Montage Plastic Bags, samedi 19 mai, crédit photo Eric Bernard 2012
Vendredi 18 mai: l’équipe sécurité SNCF participe au montage © crédit photo entreprise contemporaine 2012
La petite fille qui vient de passer près de trois heures à nouer des sacs revient nous voir presque chaque jour, très fière de la progression de « son » oeuvre. Pascale Marthine Tayou, sans doute, ne la détromperait pas: elle aussi est artiste. Cette fierté, après quelques hésitations au départ — très peu finalement — flotte comme un air de fête au sommet de la colonne, arbre, buisson de couleurs: Plastic Bags. C’est que l’arbre de sacs colorés a des vertus: une employée de l’espace commercial nous présente sa famille, l’équipe de la sécurité veut elle aussi poser ses sacs. Une femme en deuil nous avoue que c’est un peu un symbole pour elle, cette oeuvre: une sorte de retour à la vie. Des témoignages comme cela, nous en avons des centaines. Même ceux qui ne confient rien sont éloquents: certains restent cinq minutes, d’autres une heure et plus. Beaucoup entrent dans l’espace de création en nous demandant à quoi cela sert, cette chose sur laquelle ils ne parviennent pas à mettre des mots. Alors, nous le faisons ensemble: nouer un sac de couleur sur la trame du filet. Et les mots viennent; oui, bien sûr, ils comprennent: au-delà des images symboliques sur notre consommation, il y a l’envie de faire, d’être ensemble, de faire ensemble. Beaucoup qui passent tous les jours dans la gare viennent vérifier qu’ils sont bien toujours là, « leurs sacs ». Une autre fait des voeux en posant les siens. Un conteur improvise un chant sur le thème du jour: des sacs plastiques. Alors oui, si c’est cela, créer, nous sommes tous artistes. Nicolas Bourriaud, qui parle « d’esthétique relationnelle », serait fier lui aussi, sans doute, de pouvoir vérifier son idée: l’art comme lien. Un art de vivre, en sorte, au sens fort. L’art de vivre ensemble, de composer une symphonie de couleurs aux teintes aussi diverses que ceux qui les ont posées. Peut-être l’oeuvre continuera-t-elle de bruire de leurs voix, car il y a là toutes les peines et toutes les joies, et le bonheur de savoir que l’on partage quelque chose. Quelque chose qui ressemble à la nature humaine.
Les interviews d’Emmanuelle Amiot-Saulnier:
Plastic Bags Saint-Lazare: Marianne Mathieu, Chargée des Collections du musée Marmottan Monet, Paris [soundcloud url= »http://api.soundcloud.com/tracks/47304690″ iframe= »true » /]
Plastic Bags Saint-Lazare: José-Manuel Goncalves, Directeur du CentQuatre, Paris [soundcloud url= »http://api.soundcloud.com/tracks/47303546″ iframe= »true » /]
Plastic Bags Saint-Lazare: Sophie Boissard, Directrice Générale de Gares & Connexions [soundcloud url= »http://api.soundcloud.com/tracks/47305435″ iframe= »true » /]